Dans un rapport cité par Reuters, les analystes de Morgan Stanley estiment qu’un euro numérique pourrait empêcher une baisse de 8 % des dépôts des consommateurs dans les banques de la zone euro. Cette analyse intervient alors que la Banque centrale européenne (BCE) se prépare à entamer des recherches sur un euro numérique dans les prochains mois. Toujours selon les commentateurs, le montant pourrait être plus important dans certains petits pays de la zone euro.
Le scénario du Bear Case
La prévision en question est basée sur un hypothétique scénario « bear case » dans lequel des citoyens de la zone euro âgés de plus de 15 ans transfèrent 3 000 euros (3 637 dollars) sur un portefeuille numérique. Les analystes chez Morgan Stanley ont découvert que, dans ce cas, le nombre de dépôts pourrait être réduit de 873 milliards d’euros, soit 8 %. En outre, le ratio moyen prêt/dépôts passerait de 97 % à 105 %.
Ce changement, selon le commentaire de Morgan Stanley, serait à peine perceptible sur les grands marchés. Cependant, les plus petits pays, tels que la Lettonie, la Lituanie, l’Estonie, la Slovaquie, la Slovénie et la Grèce, connaîtraient des conséquences plus importantes. Ces répercussions comprendraient la conversion de 3 000 euros équivaudrait à convertir 17 à 30 % du total des dépôts, et 22 à 51 % du total des dépôts des ménages dans ces pays.
Le risque fondamental pour la BCE
« Le risque fondamental est qu’un euro numérique fasse plus que simplement remplacer les espèces physiques », déclare Reza Moghadam, conseiller économique en chef de Morgan Stanley. Le grand public pourrait délaisser les dépôts bancaires privés au profit des euros numériques émis par la Banque Centrale Européenne, ce qui augmenterait les coûts de financement des banques.
La BCE est susceptible de limiter le montant qui peut être conservé dans les portefeuilles numériques, qui sont destinés à être fournis et maintenus par les banques, afin de minimiser l’impact sur les banques. Un maximum d’environ 3 000 € par personne est parfois évoqué, ce qui semble raisonnable dans les économies riches, mais pourrait poser des problèmes aux banques dans les économies plus petites et moins prospères. L’ampleur du plafond est un aspect crucial sur lequel la BCE doit se pencher. »
Quelles sont les ramifications pour la stratégie ?
Toujours selon l’institution financière américaine, la plus importante ramification est qu’une fois les espèces disparues, le rendement des euros numériques peut théoriquement être fixé à n’importe quelle valeur, y compris négative. La BCE ne serait plus liée par la contrainte du rendement nul des espèces, ce qui lui permettrait de réduire les taux directeurs au niveau qu’elle jugerait nécessaire en cas de récession grave. Les gouvernements pourraient également faire preuve de créativité, par exemple en stimulant l’économie par de l’argent programmé qui disparaîtrait s’il n’était pas utilisé avant une certaine date. Toutefois, il faudra peut-être attendre encore des années avant de voir de telles percées.