Amazon s’exclut de la « charte de bonne conduite » de Mounir Mahjoubi au dernier moment. Alors que le secrétaire d’Etat Digital a annoncé exclusivement la signature, prévue mardi, d’une charte engageant « toutes les grandes plateformes de commerce électronique » en faveur d’une plus grande transparence vis-à-vis de leurs tiers vendeurs, c’est-à-dire des PME et des petites entreprises françaises contraintes de vendre leurs produits pour accéder au public, l’initiative a échoué. Fin amère pour une négociation de cinq mois entre les plateformes et le gouvernement.
Cinq mois de médiation, Amazon se retire au dernier moment !
Dans un entretien avec le parisien, Mounir Mahjoubi explique que la charte sera signée mardi, comme prévu. Mais sans Amazon ou Alibaba. Si les autres principales plateformes d’e-commerce en France, à savoir Leboncoin, Rakuten, Cdiscount, eBay, Fnac Darty, La Redoute, Mano Mano et Conforama signeront bien le document, l’absence d’Amazon est vraiment tachée, car le géant américain pèse à lui seul 20,2 % du marché électronique français, soit un peu plus d’un chiffre d’affaires en ligne sur cinq. Amazon cristallise également les tensions avec les PME françaises. Autrement dit, le retrait du géant américain annule en partie son sens, une initiative lancée dans la réalité en grande partie à cause de lui.
Pour résoudre le problème, Mounir Mahjoubi avait convoqué en novembre dernier les principales plateformes du commerce électronique à une « médiation » sans précédent. Un site Web a été lancé début novembre pour permettre aux PME et TPE françaises de partager les difficultés rencontrées sur les plateformes. Une centaine de témoignages ont été rapportés, la plupart exprimant des plaintes à propos d’Amazon, même si d’autres plateformes ont également été mentionnées.
Le gouvernement les a ensuite rencontrés pour élaborer cette « charte de bonne conduite », censée « anticiper le futur règlement européen sur le commerce électronique » qui ne se concrétisera pas avant 2020, comme l’explique Mounir Mahjoubi. Son contenu sera révélé en détail mardi, mais il engage les plateformes à faire preuve de « plus de transparence dans les relations commerciales » avec les PME, notamment en mobilisant des ressources humaines pour répondre rapidement, par téléphone ou par courrier électronique, aux problèmes rencontrés par les tiers vendeurs.
Rupture unilatérale des relations, déréférencement brutal, contraintes de prix, contrefaçons…
Plus de 10 000 PME et TPE français utilisent Amazon pour vendre leurs produits, afin de toucher une nouvelle clientèle et d’augmenter leur chiffre d’affaires. Pour certains d’entre eux, être sur Amazon et autres est une question de vie ou de mort, car les plateformes sont la passerelle vers les consommateurs à l’ère du e-commerce. Cette situation crée un déséquilibre des rapports de forces, les TPE/PME étant en fait dépendantes de la bonne volonté des plateformes.
Les principales raisons d’insatisfaction sont des pratiques radicales : adoption unilatérale de relations sans explication, déréférencement brutal et arbitraire, baisse des prix… sans parler de la présence de nombreuses contrefaçons de produits importés, en particulier de Chine, créant une concurrence déloyale pour les acteurs français. L’arbitraire des prix est également un problème : lors du renouvellement de leur contrat, certains vendeurs tiers doivent s’acquitter d’un montant multiplié par deux ou trois, voire par 35% de leur chiffre d’affaires, sans toutefois pouvoir négocier.